« Marque pays » : le rôle de la France dans l’attractivité étudiante
Depuis quelques années, la France a perdu de l’attractivité à cause de son actualité violente et fortement médiatisée. Le programme Erasmus ayant connu ses grandes heures, de nouvelles dispositions sont prises par l’Education Nationale etl’Etat. Le gouvernement a décidé d’agir pour relancer son potentiel attractif auprès des étudiants étrangers en créant le projet « Bienvenue en France » dirigé par Frédérique Vidal (actuelle Ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation).
Contexte
Depuis sa création en 1990, la notion de « marque pays » s’est largement développée. En France, elle représente le phénomène par lequel un produit ou une marque peut bénéficier du fait de s’afficher ou de se revendiquer comme français (Bathelot, 2017). D’après Anholt et Dinnie (2007), la notion s’est naturellement installée dans le langage commun et possède un pouvoir d’influence de plus en plus important (domaines du tourisme et de la communication publicitaire notamment). La « marque pays », c’est avant tout l’ADN d’un territoire, son identité. En 2011, Kapferer propose de la construire d’après les représentations suivantes :
- La politique,
- L’économie,
- La technologie,
- Le rayonnement culturel,
- Le rayonnement sportif,
- Et l’éducation.
La France dispose de nombreux atouts : les marques de luxe, la gastronomie, le patrimoine artistique, historique et culturel, l’architecture, l’art de vivre, les paysages variés, le rayonnement de Paris et bien sûr, son surnom de « pays des droits de l’Homme ».
Ce qui en fait une grande force de soft power. En 1990, Joseph Nye définit ce concept comme « l’habileté à séduire et à attirer ». Dans un contexte de renouvellement de son image, la France cherche à capter des étudiants internationaux sur les points suivants :
- Sa capacité à enseigner et à former les élites de demain ;
- Promouvoir ses valeurs, sa culture, ses idéologies et ses idées politiques.
La « marque France » s’adresse donc au reste du monde. En 2002, Srikatanyoo et Gnoth définissent l’image d’un pays comme « les croyances cognitives des étudiants sur le pays et sur son degré d’industrialisation, de standards de qualité nationaux et d’autres informations en lien avec les produits et services ». D’après Michel Gardel (2013), la « marque France » doit avoir comme objectif d’améliorer la réputation et le dynamisme de l’économie française. C’est cette image qui va servir de base aux étudiants lors de leur choix de destination.
Selon Bourke (2000), une partie des étudiants étrangers font le raccourci suivant : un pays possédant une image positive propose forcément une bonne qualité de formation (sans pour autant avoir la moindre information sur la qualité réelle des établissements d’enseignements supérieurs).
La France, une « marque pays » forte et déstabilisée
En 2011, Philippe Lentschener affirme que le territoire français possède une « marque pays » forte. Celle-ci dépend cependant de deux types d’acteurs : les acteurs internes (les français) et les acteurs externes (les touristes, les journalistes et les étudiants étrangers). Par le biais de ces protagonistes, l’image de « la marque France » peut être déstabilisée.
A titre d’exemple, les stéréotypes sont des freins au développement de cette identité de marque (Kapferer, 2011 et Bonnal, 2011) : les touristes ont (très) souvent une mauvaise image du citoyen français (sale, impoli, fainéant), ce qui peut ternir l’image qu’ils ont de la France.
L’attractivité du pays est aussi sensible à son environnement. Depuis plusieurs années, le contexte géopolitique français a fortement impacté l’image du pays à l’international, notamment à cause des attentats terroristes et, récemment, par le mouvement social des gilets jaunes.
Des images choquantes, spectaculaires, de la France en « guerre civile » véhiculées par les médias ont fait le tour du monde. Les images ont un pouvoir indéniable car elles ont la faculté à susciter des émotions (Joffe, 2007). Pendant de nombreux mois la France a été assimilée à un lieu dangereux, où règne l’insécurité. Ces scènes de violence ont un effet néfaste et durable sur les personnes qui ne vivent pas dans le pays car une image vaut mille mots. La surexposition médiatique a eu de nombreuses conséquences (Truc, Le Bart et Née, 2018) : comme une diminution du nombre d’arrivées en France et un grand impact sur le secteur hôtelier et le secteur touristique.
Pour maintenir une « marque pays » forte, la France doit mettre en valeur et améliorer ses atouts. Il est très important pour le pays de continuer à attirer les étudiants expatriés en France :
- Ces cerveaux internationaux sont une vraie valeur ajoutée.
- Ils deviennent ambassadeurs du pays à leur retour chez eux : ils peuvent promouvoir la culture, les valeurs et les idées politiques du pays d’accueil.
- Ils génèrent des revenus et font tourner l’économie.
De plus, Kratz et Netz (2018) expliquent que les étudiants internationaux ont un accès facilité aux grandes entreprises internationales avec des salaires plus attractifs. Ces organisations considèrent qu’un échange international est synonyme d’implication financière, émotionnelle, psychologique, ce qui est signe de grande productivité et de fortes compétences.
Liwiński (2019) précise que les individus diplômés ayant fait un séjour à l’étranger d’au moins un mois gagnent en moyenne 22% de plus dans leur premier travail que ceux ayant passés leur scolarité dans leur pays d’origine.
Streitwieser (2014) insiste sur l’importance des pays à créer leur propre programme d’accueil.
Le programme « Bienvenue en France »
Actuellement la France reste un pays très attractif malgré une stratégie nettement moins offensive que d’autres pays (Allemagne, Royaume-Uni, Chine, Etats-Unis). Le projet « Bienvenue en France » (créé à l’initiative du gouvernement d’Edouard Phillipe) a pour objectif d’atteindre le grand chiffre du demi-million d’étudiants d’ici 2027. L’État a proposé 5 points clés de simplification :
- La mise en place d’une procédure dématérialisée pour simplifier et rendre plus rapide l’obtention des visas.
- La multiplication du nombre de cours dispensés en anglais dans les universités et les écoles privées.
- Le développement d’un label à destination des lieux de formation pour garantir la qualité du dispositif d’accueil.
- La différenciation des frais d’inscription. Pour une raison d’équité tous les étudiants hors de l’espace économique européen devront payer le tiers du coût réel de la licence. Parallèlement à cette décision, bon nombre d’étudiants auront accès à une bourse d’études.
- Le lancement d’une campagne de communication mondiale en ciblant principalement les pays dynamiques d’Asie comme l’Inde, le Vietnam ou encore la Chine.
Dans une course à la « mondialisation universitaire » (Strassel, 2018), les Etats sont en train de transformer le monde en un « supermarché géant » (Anholt, 2002). Chaque pays doit se distinguer dans une logique de compétition. Il est important d’être attractif dès le début du cursus estudiantin international. D’une part, pour que les étudiants formés en France viennent y apporter leurs forces de travail et consolider l’image de la France à l’étranger. D’autre part, pour encourager le développement des entreprises françaises à l’international. La « marque France » doit continuer à se développer et à s’adapter pour atteindre le top 3 des pays les plus attractifs au monde.
(Article inspiré par le mémoire de recherche de Sacha Blanpain, promo 26, ISTC)
Short Paper rédigé par Anaëlle Gallée, Juliette Moranval et Iroise Bardoux
La Capsule Académique